A quelle date le pic de l’épidémie Covid-19 sera-t-il atteint en France ? Certains experts, qui ont trouvé un lien entre les courbes d’évolution du coronavirus en Italie et celles en France, estiment que le pic pourrait être atteint ce week end. Un autre étude détermine le pic plutôt fin avril/début mai.
[Mis à jour le vendredi 27 mars à 9h57] Chaque jour, le bilan des personnes malades et des décès dus au coronavirus s’alourdit. Mais la maladie, qualifiée depuis le 11 mars de pandémie par l’Organisation mondiale de la Santé, est-elle à son paroxysme ? La France doit s’attendre à des « jours difficiles », a précisé le directeur général de la Santé. Jérôme Salomon, lors de son point de situation quotidien du 25 mars. Dans ce contexte épidémique, des chercheurs ont tenté de prédire l’évolution de la propagation du coronavirus lors de ces prochains mois, en tenant compte des facteurs sociaux ainsi que des mesures d’hygiène et de confinement mises en place par les autorités de chaque pays. Ils se basent également sur le nombre de personnes qu’un malade peut infecter, soit la vitesse de transmission de la maladie.
Le pic de l’épidémie en France devrait en effet avoir lieu autour du samedi 28 mars.
Le nombre de nouveaux cas augmente de façon croissante depuis le 8 mars : 177 nouveaux cas le 8 mars, 286 nouveaux cas le 9 mars, 372 nouveaux cas le 10 mars, 497 nouveaux cas le 11 mars, 595 nouveaux cas le 12 mars… « Le nombre de cas double désormais tous les 4 jours« , a confirmé Jérôme Salomon, directeur de la Santé lors d’un point presse du 19 mars. Pour autant, il est difficile de prévoir si le nombre de cas poursuivra son ascension, se stabilisera ou si au contraire, chutera. Le pic de l’épidémie pourrait être atteint entre le 25 et le 28 mars, signale Jérôme Salomon, Directeur Général de la Santé lors de son point de situation du vendredi 20 mars. Par ailleurs, l’évolution de l’épidémie en France semble suivre celle de l’Italie, avec un décalage de 8 jours, si on analyse les courbes des nouveaux cas et des décès. Comme le pic en Italie semble avoir été atteint (depuis la mise en place du confinement) vers le 20 mars 2020 (augmentation des cas de +15% ce jour-là), le pic de l’épidémie en France devrait en effet avoir lieu autour du samedi 28 mars. Enfin, la date du pic épidémique peut différer en fonction des régions. Par exemple, le bilan dans la région Grand Est a fait un bond vertigineux en ce milieu de semaine (faisant 173 décès supplémentaires entre le 25-26 mars), ce qui semble indiquer que le pic de l’épidémie dans cette région est proche.
Dans ce contexte pandémique, le confinement de la population, mis en place en France le mardi 17 mars 2020, autrement dit le respect de la distanciation sociale, semble être indispensable pour réduire le nombre de cas, retarder voire atténuer le pic épidémique et limiter son influence sur le système de santé. « Il faudra entre 10 à 28 jours pour obtenir un résultat de la modification des comportements et du confinement », poursuit-il. « Le pic, on n’y est pas du tout. Ce n’est qu’à partir du moment où l’on constatera une diminution du nombre de cas quotidiens qu’on aura franchi le pic épidémique« , indique au contraire le Professeur François Bricaire, infectiologue et membre de l’Académie nationale de médecine, contacté par Capital.
Le pic de l’épidémie se situerait entre le mois d’avril et le mois de mai.
Une étude* publiée le 31 janvier 2020 dans la revue spécialisée The Lancet, a estimé que la maladie atteindrait probablement un pic entre les mois d’avril et mai 2020. Pour parvenir à cette conclusion, les chercheurs ont réalisé de nombreuses courbes prédictives dans plusieurs villes chinoises particulièrement touchées par le virus (Pékin, Wuhan, Shanghai…). Pour chacune d’entre elles, ils ont constitué des « scénarios », en faisant à chaque fois varier deux paramètres : la transmissibilité du coronavirus (c’est-à-dire la capacité du virus à se transmettre) et la mobilité inter-urbaine dans la ville. Résultats : pour chacun des scénarios, le pic de l’épidémie se situe entre le mois d’avril et le mois de mai 2020. « S’il n’y a pas de réduction de la transmissibilité, l’épidémie atteindrait un pic vers avril 2020 et les épidémies locales dans les villes de Chine continentale seraient en retard de 1 à 2 semaines. En revanche, si la transmissibilité est réduite de 25% dans toutes les villes du pays, le taux de croissance et l’ampleur des épidémies locales seraient considérablement réduites : le pic épidémique serait retardé d’environ 1 mois (ce qui amène au mois de mai, ndlr) et son ampleur serait réduite d’environ 50%« , expliquent les auteurs de l’étude. Pour autant, la Commission nationale chinoise de la santé a indiqué, jeudi 12 mars 2020, que le pic de l’épidémie de coronavirus dans le pays était désormais passé et que le nombre de nouvelles infections continuait à diminuer. En effet, la Chine a fait état ce jour-là de son niveau de nouveaux cas le plus bas (15 nouvelles infections et 11 décès) depuis l’apparition du coronavirus en décembre 2019 à Wuhan.
Quelques courbes prédictives du pic de l’épidémie Covid-19 en Chine
Les résultats de l’étude ne sont que des prédictions et ne seraient donc pas fiables à 100%. Et ce, pour plusieurs raisons. Le virus responsable du Covid-19 a été découvert très récemment : sa période d’incubation (temps qui s’écoule entre l’époque de la contagion et l’apparition des symptômes d’une maladie) qui varie de 3 à 14 jours n’est pas assez précise pour déterminer de manière formelle la date du pic. De plus, 80% des gens ne font pas ou peu de symptômes, donc c’est un virus qui est asymptomatique ou bénin chez l’immense majorité des Français », a précisé le ministre de la Santé, Olivier Véran le lundi 9 mars 2020, ce qui ne permet pas de déterminer avec précision le nombre de personnes qu’un malade peut contaminer.
Enfin, ce virus serait capable de muter très facilement, selon les dernières données scientifiques. Pourraient alors se développer d’autres souches du virus (actuellement, il n’y aurait que deux souches qui circulent : L et S), plus ou moins contagieuses et plus ou moins pathogènes. « Ça, c’est impossible de le prédire », insiste Christophe d’Enfert, Professeur à l’Institut Pasteur et Directeur de l’Unité Biologie et Pathogénicité Fongiques. Et on peut facilement imaginer que si le coronavirus est capable d’acquérir d’autres mutations, il est très difficile, voire impossible à ce jour, de déterminer sa vitesse de transmission, sa contagiosité, son taux de reproduction et donc le pic maximal de l’épidémie. Voilà pourquoi en l’absence de données fiables, le gouvernement continue d’appliquer des mesures de confinement et d’endiguement du virus.
*Etude « Nowcasting and forecasting the potential domestic and international spread of the 2019-nCoV outbreak originating in Wuhan, China: a modelling study », publiée le 31 janvier 2020 et paru le 29 février dans la revue spécialisée The Lancet.